
Marcel Chardin :
un jeune héros de Cherbourg
La petite jetée à Cherbourg est aujourd’hui un lieu calme jouxtant l’école de voile. Pourtant, elle a été le théâtre, il y a 90 ans, d’un drame qui a marqué très fortement la population cherbourgeoise.
Il faisait beau ce 27 juillet 1932, les baignades étaient au rendez-vous de cette journée familiale, sur le sable fin de la plage Napoléon (NDLR : aujourd’hui plage verte). Vers 18 heures, la journée se termine et les familles commencent à quitter la plage. Pourtant, au même moment, deux jeunes garçons, Georges David et Georges Jean, tous deux âgés de 15 ans, décident de rejoindre la petite jetée pour se baigner.
Les deux jeunes n’ont pas conscience du risque et de la présence du courant. D’autant plus que ni l’un ni l’autre ne savaient nager. Très vite, ils perdent pied, le courant entraîne les deux jeunes au large. Marcel Chardin, lisant au même moment son journal sur le muret de la petite jetée, entend les cris des deux garçons. Sans hésiter, il se jette à l’eau pour les sauver. La population interloquée, présente sur la petite jetée, regarde la scène. Marcel Chardin est un bon nageur, il parvient à sauver Georges David. Pourtant, Marcel Chardin retourne à la mer pour sauver le second, mais celui-ci se débat et s’accroche à lui. Les deux individus disparaissent alors sous la mer et seront retrouvés dans la soirée sans vie.
Souvenir
Aujourd’hui, il reste de cette histoire un buste en bronze dans le jardin du Stade Maurice Postaire, une œuvre du sculpteur Marcel Jacques. Un peu oublié, mais visible de la route, ce buste, qui regarde le ciel, a vu le jour grâce à la souscription lancée en son temps par le Comité Marcel Chardin. Mais que savons-nous sur ce jeune Cherbourgeois mort à l’âge de 22 ans ? Le jeune homme travaillait comme vendeur à la Maison des Abeilles, une chemiserie située quai de Caligny à l’époque, il vivait avec sa mère rue des Moulins à Cherbourg et venait de perdre son père, trois mois avant son acte héroïque. La mère de Marcel Chardin ne se remettra jamais de la perte de son fils après celui de son époux.
Unité
Au-delà de cette histoire, le nom de Marcel Chardin incarne une partie de l’histoire de Cherbourg. En 1934, pour l’inauguration du buste, le maire de Cherbourg, Jules Le Brettevillois, prononça dans son discours une phrase qui résonne encore aujourd’hui : « Que nos jeunes concitoyens prennent dans leurs cœurs la résolution de rester fidèles à l’inoubliable leçon de courage et de dévouement que Marcel Chardin leur a donnée. » Ce buste, important pour le patrimoine de Cherbourg, sera également symbole de résistance. En effet, il a été retiré et caché durant l’occupation par des employés municipaux de la Ville de Cherbourg, afin d’éviter qu’il soit fondu par l’occupant. Le buste de Marcel Chardin retrouva son piédestal à la libération de la ville.
Nicolas Calluaud
Cherbourg et son Histoire